Saly la lingère
Le dimanche 15 Décembre 2019, ne me sentant pas bien, je fis appel à une lingère pour laver les habits des filles. Elle est venue, nous avons échangé et j’ai été tentée de lui demander de réduire le coût de la prestation. Mais c’était avant d’en savoir un peu plus sur elle.
Saly, son nom, ne se sentait pas du tout bien ce jour. Alors Je décide de l’aider. Sur mon insistance, elle accepte de partager un repas avant de partir. Mais bien avant son départ, je me suis permise de lui poser quelques questions.
J’ai appris qu’elle habite la commune d’Abobo, quartier d’où elle part quasiment chaque jour pour rejoindre Riviera pour les lessives chez ceux qui en expriment le besoin.
En outre, Elle m’informe qu’elle fait ce boulot tous les jours et pas plus tard que le samedi, elle a lavé, nettoyé et rangé la vaisselle lors d’un baptême jusqu’à 20h.
Elle m’a dit ne mener que cela comme cette activité, souvent, 24h/24 et 7jours/7.
– Quel temps donnes tu au repos, lui demandai-je ?
– Je ne me repose jamais. A moins qu’il n’y a pas de lessive à faire. Je reste alors chez moi ; répondit-elle timidement.
Lui ayant déjà remis son argent, j’ai dû lui payer en plus le transport.
Saly quitte sa maison, laissant enfants, mari, parcourt Abidjan, maison après maison, à la recherche de son pain quotidien. A lire aussi ” Nous portons le monde “.
Ces femmes qui n’hésitent pas à se sacrifier, à tenter le tout pour le tout pour leurs familles; ces femmes qui ne se permettent aucun repos, aucun plaisir mettant à rude épreuve leur corps souvent même l’estomac vide parce qu’elles sentent le devoir d’assurer pour la famille, constituent la face cachée du rôle de la femme dans nos différentes familles.
Plus j’y pense, plus, je me dis que nous n’avons aucune excuse pour ne rien faire de nos dix doigts.
Saly aurait pu rester là à se lamenter ou faire le commerce de son corps, à voler, à tuer mais Saly a fait le choix de se battre, de mériter ce qu’elle touche.
Des Saly, il y en a des milliers à travers le monde. Force et courage à elles. Force et courage à nos infatigables mamans.
Sil t’arrive de vouloir baisser les bras, pense à Saly et à toutes ces mamans, ces femmes qui ont refusé la fatalité.
Pense à toutes ces femmes qui continuent de se battre; qui ont compris que seul le travail nourrit son homme.
Souviens-toi de toutes ces femmes qui ont compris que rien ne s’obtient par la facilité.
Remémore-toi ces femmes qui ont compris que la lutte est une lutte quotidienne.
Aies à l’esprit ces mères qui ont compris qu’elles doivent donner le meilleur à leurs enfants.
qu’elles ont le devoir de nourrir.
Pense à ces femmes qui ne veulent pas être soumises et qui refusent de dépendre de qui que ce soit.
Leur autonomie, leur liberté elles ne la doivent à personne.
Elles se battent au quotidien et continuent de se battre.
J’ ai regardé Saly partir, j’ai pas pu m’empêcher de lui faire cette photo. Saly venait de me donner une bonne leçon.
A chaque fois que je voudrais baisser les bras, je regarderai cette image, je penserai à Saly et je serai à nouveau motivée.